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Photo du rédacteurEmilie et Ophélie

N comme… Naissance et premières années de vie.

Dernière mise à jour : 1 déc. 2019

Faire-parts, baby-shower (fête prénatale),... L'arrivée d'un enfant est aujourd'hui un véritable évènement pour les couples désireux d'agrandir leur famille.


L'annonce d'une grossesse dans ce contexte est souvent célébrée et l'arrivée de bébé minutieusement préparée : on repeint la chambre qui sera la sienne, on y installe berceau, doudous, jouets, meubles, on s'équipe d'une poussette, d'une baignoire, d'une table à langer, de couches, d'habits,... La liste est longue, normal, rien n'est trop beau pour bébé !


Mais qu'en était-il pour nos ancêtres ? Vivaient-ils l'annonce de la grossesse de la même façon que nous ? J'entends par là dans les cas où la grossesse était désirée.


Avouons que quand bébé est espéré et que les deux petits traits du test de grossesse signifie que oui, dans neuf mois il sera vraiment là, autant on entame la danse de la joie le test à la main, autant la perspective de l'accouchement peut quant à elle faire peur à plus d'une femme. Alors imaginez à l'époque de nos ancêtres, qui n'avaient ni péridurale, ni maternité avec attirail dernier cri… Dès lors que les femmes de notre généalogie étaient enceintes, c'était leur vie qu'elles mettaient en danger. Sachant que les fratries étaient bien souvent assez nombreuses…

C'est qu'elles vivaient dangereusement nos ancêtres !


Si elles prenaient des risques en tombant enceintes, les femmes n'étaient en plus pas spécialement "chouchoutées". Ou du moins, travailler aux champs jusqu'à l'accouchement n'est pas vraiment l'idée que je me fais de la question . En effet, le congé maternité n'apparaît en France qu'en 1909. Les femmes enceintes ont alors droit à huit semaines d'arrêt… durant lesquelles elles ne sont pas payées.

Les semaines passent, puis les mois, et enfin vient le jour de l'arrivée de l'enfant.

Les femmes accouchent chez elles, entourées des femmes de leur famille et d'une matrone ou d'une sage-femme suivant l'époque (Ophélie évoque les accouchements du XVIIIe siècle au XXe siècle à la lettre Z). Première étape pour le petit être qui voit à peine le jour : survivre à l'accouchement. A l'époque de nos ancêtres, entre les maladies, la dureté de la vie (certains meurent d'épuisement, même parmi les enfants), les enfants n'atteignent malheureusement pas tous l'âge adulte. Nombreux étaient les nourrissons qui décédaient à la naissance ou dans les premières années de leur vie.

J'ai rencontré au fil de mes recherches des familles nombreuses, mais dans lesquelles la plupart des nourrissons ne survivaient pas. Nous ne savons pas vraiment quels étaient, sous l'Ancien Régime, les sentiments des parents face à ces drames. Tous savent à quel point la mortalité chez les touts petits est élevée. Mais le savoir ne veut pas dire qu'ils le banalise pour autant.


A peine l'enfant est-il né que la préoccupation majeure est de le faire baptiser le plus rapidement possible. En effet, sans baptême l'enfant est condamné à errer dans les limbes pour l'éternité, chose que les parents redoutent plus que tout. Pierre MARTIN (un des très nombreux MARTIN de ma généalogie, dont je vous parle dans l'article B Bienvenue chez les Martin !) est ainsi baptisé le 15 janvier 1757 "le premier jour de son âge". La mère est souvent absente du baptême. Celui ci se déroulant parfois le jour-même, l'accouchée n'a pas forcément le temps d'être déjà sur pieds.

Avant le XVIIIème siècle, les femmes accouchent en position assise. Ce sont les matrones, élues par les paroissiennes du village, qui accouchent les femmes habitant aux alentours. Il faut qu'elles aient de bonnes mœurs, une bonne conduite, une vie irréprochable. Elles prêtent serment devant le curé qui s'assure de leur aptitude à ondoyer le nouveau-né (l'ondoiement est une cérémonie simplifiée du baptême) si celui-ci est en péril de mort. Au fil de mes recherches, j'ai rencontré dans les actes de nombreux cas d'ondoiement par les matrones ou sage-femme.


"Le 18 avril 1792 a été ondoyé à la maison une fille de Jean FAGOT officier municipal et de Marguerite PHELIPPEAU par Jeanne FAGOT accoucheuse le dit enfant est mort et a été ondoyé le même jour".

Le mot ondoyé a été barré, mais je ne sais pas s'il s'agit d'une erreur. Au vue des noms de famille, il y a des chances pour que "l'accoucheuse" soit de la famille du père de l'enfant.


Au XVIIIème siècle, l'ordre du jour est à la formation des sages-femmes, ce qui permet une diminution des décès des mères comme des enfants. Entre 1760 et 1780, Marie-Angélique Le Boursier du Coudray (1712-1792), elle-même sage-femme, parcourt la France pour donner des cours d'accouchement à l'aide d'une machine de démonstration (qu'elle met elle-même au point). Elle forme ainsi cinq mille sages-femmes.


Dans le même temps, il semble que le nombre d'enfants par femme recule, d'abord dans les villes, puis peu à peu dans les campagnes. Plusieurs raisons à cela :


*l'Âge au mariage qui a tendance a reculer. Qui dit mariage tardif dit premiers enfants qui viennent plus tard et donc forcément moins d'enfants dans le foyer.


*Afin d'éviter le morcellement du patrimoine (pour ceux qui en ont).


*La mise en nourrice. Dès le XVIIème siècle et surtout dans les villes, on cherche le bon air de la campagne et le bon lait des femmes y habitant pour les nouveau-nés, en même temps qu'un peu de repos pour la jeune mère. Pour cela, un certain nombre de couples confient leur bébé à une nourrice installée à la campagne. Pour les familles aux revenus modestes, cela veut dire faire un vrai effort financier. Malheureusement, la réalité est loin d'être parfaite. En effet, la mortalité chez les nourrissons mis en nourrice est très élevée. La faute au trajet d'abord, lors duquel un "meneur" chargé d'amener les touts petits les transportaient sans réellement s'en occuper. On retrouve des illustrations de "meneurs" transportant les petits à plusieurs dans des hottes en osier comme des marchandises.


Gravure du XIXème siècle


Et faute à la nourrice elle-même ensuite. Elle pouvait allaiter plusieurs enfants à la fois, et n'avait donc pas assez de lait pour chacun d'entre eux. Sans parler de la surveillance, à laquelle les petits échappaient facilement, de l'alimentation parfois inadaptée (bouillie ou lait animal), du manque d'hygiène ou encore pour certains de la maltraitance...


*L'espacement ou même l'arrêt des naissances qui constitue une forme de contraception. Ce phénomène, plus ou moins important selon les régions, commence à se percevoir nettement après 1750.



Quelque soit l'époque, le nombre de naissances par couple dépend du contexte : les périodes de crise comme les guerres, les épidémies, les périodes de famines, de grands froids… ont forcément un impact sur la natalité.


La naissance d'un enfant désiré est un moment particulier dans la vie d'un couple. Si chacun a aujourd'hui une manière bien à lui de l'anticiper puis de le vivre, avoir un enfant était également un évènement important pour nos ancêtres. Il pouvait être vécu différemment suivant le sexe de l'enfant. Par exemple, avoir une fille impliquait de constituer une dot pour son futur mariage (bien que certaines femmes la constituait elles-mêmes, comme ce fut le cas pour Louise COUE dans Mariage entre domestiques).


Il est difficile de savoir quelle réaction pouvait avoir nos ancêtres à l'annonce de leur grossesse. Mais tout comme nous, il est peu probable qu'elles y est été complétement indifférentes.

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