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  • Photo du rédacteurEmilie et Ophélie

Où es-tu Noélie ?

Dernière mise à jour : 1 déc. 2019

Noélie Héris en bas à droite entre 1896 et 1900 (photo originale et colorisée). https://colourise.sg/#colorize



Noélie Héris est mon arrière-arrière-grand-mère maternelle. Elle est aussi « la mystérieuse » de ma généalogie du moins au début de sa vie. Pour certains d’entre vous, elle ne vous est pas complétement inconnue. Je lui ai rendu hommage le 10 mars 2019 dans plusieurs tweets. Elle est décédée le 10 mars 1911.


Elle serait née dans les années 1860. Il n’existe pas de date précise puisque sa naissance n’a pas été enregistrée sur les registres de l’état civil. Afin de pouvoir se marier le 24 novembre 1888 avec Jean-Gabriel Gaudeboeuf (que je vous ai présenté dans l’article intitulé Horrible destin), elle a dû fournir un acte de notoriété (AD, série « U », justice, sous-série « 4 U » justice de paix ).


Cet acte vient confirmer le 17 septembre 1888 sa filiation. Il remplace l’acte de naissance manquant conformément à la loi articles 70 et 71 du Code Civil.


L’acte de notoriété


L’acte de notoriété a été délivré par le juge de paix du canton de l’arrondissement de Bordeaux où vivait Noélie Héris. Le témoignage de 7 personnes était requis. Les témoins qui ont comparu n’ont pas de liens de parenté avec Noélie. Un des témoin se trouve être son patron, Auguste Dejean âgé de 60 ans, demeurant sur Bordeaux, 50 rue du Cancera.


Ces témoins vont déterminer les prénoms, le nom, la profession, le lieu de résidence de la future épouse et les noms de ses parents s’ils sont connus. Les témoins ont ainsi déclaré « qu’ils connaissent parfaitement la demoiselle Noélie Catherine Héris, célibataire, majeure, domestique, demeurant rue du Cancera, 50 ».


La déclaration mentionne l’époque de sa naissance et les causes qui font qu’elle n’a pas pu avoir d’acte de naissance. Elle est née « à Bordeaux, chemin d’Arès, sans numéro, vers l’année mil huit cent soixante et qu’elle est fille naturelle de Catherine Héris, décédée vers la même année, en son vivant exerçant la profession de domestique chemin d’Arès. Que son acte de naissance n’a pas été inscrit sur les registres d’état civil de Bordeaux ».


Vu que cette déclaration repose sur des témoignages, il peut y avoir plusieurs erreurs. L’année est ainsi très approximative. Il faut dire que 28 ans séparent la « naissance » de Noélie de cette déclaration. Deux hypothèses s’offrent à nous : soit elle est née un peu avant 1860, soit elle est née dans les années 1860 (entre 1860 et 1870). Noélie Héris semble donc être orpheline. Selon les renseignements que m’avait donné ma grand-mère, Catherine Héris serait morte des suites de son accouchement.


La déclaration évoque ensuite la raison pour laquelle elle souhaite obtenir un acte de notoriété « que la demoiselle Héris étant sur le point de se marier avec le sieur Gabriel Gaudeboeuf […] ne peut le faire faute de pouvoir fournir son acte de naissance ».


L’acte de notoriété a été dressé sur papier libre du fait que Noélie Héris a obtenu un certificat d’indigence vis-à-vis de ses faibles revenus « par le commissaire de police […] de Bordeaux le 2 août 1888 ». Noélie n’avait pas à s’acquitter du paiement d’un visa pour le timbre et l’enregistrement. Je n’ai pas retrouvé son certificat en sous-série 4M.


Les témoins ont signé la déclaration avec le juge de paix. L’acte de notoriété fut ensuite présenté au tribunal de première instance où le mariage a été célébré. Le tribunal donne ou non son homologation. L’acte a été homologué par jugement du tribunal civil de Bordeaux, établissant la naissance de Noélie, comme il est mentionné dans l’acte de mariage du 24 novembre 1888.


Je décide de poursuivre mes recherches pour en savoir plus sur Noélie et sur Catherine. L’intérêt est de savoir ce qui s’est passé avant son mariage.


L’acte de décès de Catherine Héris


Je cherche alors l’acte de décès de Catherine Héris sur une fourchette allant de 1855 à 1868. D’après la déclaration, elle serait morte sur Bordeaux. Elle a donc probablement été inhumée au cimetière de la Chartreuse. Les recherches sont vaines, il n’existe aucun acte de décès ni d’inhumation à son nom.


Elle est peut-être morte tout simplement comme « inconnue ». Je trouve une « inconnue » morte à l’hôpital Saint-André en 1866. Est-ce ma Catherine ? Cette personne est rentrée à l’hôpital le 13 mai 1866 et elle est décédée le lendemain. Elle a été inhumée le 17 mai dans le champ commun du cimetière de la Chartreuse. Il est noté que la « malade est morte presque en rentrant ». Cela pourrait correspondre avec une femme qui a eu des complications suite à son accouchement. Malheureusement les causes de la mort ne sont pas indiquées. Cette hypothèse n’est donc pas vérifiable.


Une orpheline nommée Noélie


Je me lance alors sur la piste des enfants abandonnés, trouvés, assistés puisque Noélie est orpheline (sous-série « 3 X » AD). Le constat est le même pas de bébé ni d’enfant au nom de Noélie Héris si tel était bien son nom. Cela devient vraiment très mystérieux. J’étais persuadée qu’elle avait dû être placée.


Je recentre mes recherches sur l’hôpital Saint-André là où « l’inconnue » est décédée. Il existe la série H-dépôt qui correspond aux versements des établissements hospitaliers dont ceux de l’hôpital Saint-André de 1292 à 1919. Un fond m’intéresse particulièrement celui « des fonds des enfants abandonnés de 1752 à 1934 ». Toujours pas de Noélie. Qui a donc élevé Noélie ? Où demeurait-elle ? Avait-elle pu être élevée par des connaissances de Catherine ?


Le baptême de Noélie


Je décide de faire des recherches dans la série J, les archives de catholicité du diocèse de Bordeaux. Tous mes ancêtres avaient été baptisés pourquoi Noélie ferait-elle exception. Les recherches ont été infructueuses. Aurait-elle pu être baptisée sous un autre nom que celui d’Héris ?


Le diocèse de Bordeaux me fait ensuite parvenir l’acte du mariage religieux de Noélie. Le mariage religieux fut célébré le 25 novembre 1888, le lendemain du mariage civil. Auguste Dejean et Léonce Dejean (fils) font office de témoins. Son patron devait beaucoup l’estimer. C’est ce que je me suis dit. Il y a peu d’informations supplémentaires hormis qu’une dispense du troisième ban a été obtenue. Dans quelles conditions accordait-on une dispense (série G des AD) ?


  • Pour un mariage consanguin

  • Vis-à-vis de l’âge des futurs (trop jeunes)

  • Pour l’imminence d’un temps prohibé (Carême, Avent…)

  • Pour la régularisation d’un mariage clandestin

  • Pour la venue d’un bébé

  • Pour un extrait baptistaire impossible à fournir…


Il semblerait que dans le cas de Noélie la dispense d’un ban devait être à cause de l’acte de baptême qui lui était impossible de fournir et qu’ils n’ont pu retrouver sur leur registre en 1860.


Les recensements de population


Il me reste alors à compulser les recensements de population. L’acte de notoriété évoque le chemin d’Arès à Bordeaux. Il n’y a pas trace de Noélie Héris dans le recensement de 1861, chemin d’Arès. On dit souvent que le monde est petit. En 1860, née également chemin d’Arès, la cousine de son futur mari.


Le chemin d’Arès est la rue qui donne sur le cimetière de la Chartreuse. Elle fait partie du quartier Mériadeck. C’est un quartier où vivent les gens humbles, les travailleurs, les immigrés, les ferrailleurs et les « femmes du monde ». Catherine Héris alors domestique appartenait à cette classe pauvre.


En 1888, Noélie Héris, est domestique et elle vit chez Auguste Dejean 50 rue du Cancera. Du fait que son patron et le fils de ce dernier sont témoins lors de son mariage, j’imagine qu’ils se connaissent depuis plusieurs années. Le recensement de 1886 nous permettra-t-il d’en savoir plus ? Malheureusement non, Noélie n’y figure pas. Elle n’était pas encore domestique chez Monsieur Dejean. Par conséquent le témoignage de Monsieur Dejean et de tous les autres sont-ils des sources fiables ? Est-ce qu’ils connaissaient bien Noélie Héris ? Il est possible qu’elle était au service de Monsieur Dejean et de sa famille que depuis environ un an.


Dans ma tête résonne ce refrain énervant « mais t’es pas là, mais t’es où ? ». Il ne me reste plus qu’à compulser tous les recensements dans l’espoir peut-être un jour de la retrouver. Mais sous quel nom ?


Le jour de la fête des grands-mères vous aviez lancé un petit défi sur Twitter, citer tous les noms de nos grands-mères maternelles. J’étais déçue car je me trouve dans l’incapacité de remonter plus loin. Et il y a un élément dont je ne vous ai pas encore parlé que m’avait précisé ma grand-mère. Catherine ne serait pas française. L’affaire se corse. D’où était-elle originaire ?


Vous allez certainement me dire pourquoi s’entêter à continuer…je vous répondrais par curiosité, car j’aime les enquêtes compliquées… mais surtout parce que j’ai fait une promesse à ma grand-mère. Même le personnel des archives départementales de la Gironde m’invitent à poursuivre mon enquête. Je dois compulser de nouveau les fonds 3 X ainsi que H-dépôt, les recensements, le fond 4 M et le registre des étrangers. Tout le monde attend la fin de l’énigme.


Et vous, avez-vous rencontré des ancêtres « mystérieux » dans vos généalogies ?



Edition d’Ophélie



Je tiens également à remercier Jean-Claude Huguet, professeur agrégé d’histoire qui m’encourage dans mes recherches.



Sitographie





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